Les 5 défis de l'Islam 2.0

04 juillet 2013  | 1 commentaire

Catégories: Politique

Voile EuropeNous assistons en ce moment à la destitution de Mohammed Morsi de son poste de président d'Egypte qu'il occupait depuis un an après avoir été élu, pourtant, démocratiquement. Que s'est-il passé pour que le rejet soit si massif ? Qu'ont fait de mal ces Frères Musulmans dont on disait pourtant qu'ils étaient si proches de l'Egypte populaire ? Pourquoi n'ont-ils pas été capables de tenir plus d'un an alors qu'ils étaient soi-disant portés par le peuple égyptien dans sa grande majorité ?
Une réponse : l'Islam politique ne peut pas tenir longtemps au pouvoir sans devenir autoritaire parce qu'il présente des faiblesses structurelles difficiles à concilier avec le monde qui émerge, basé sur les droits de l'Homme, la Liberté et la Démocratie.
L'Islam « première version » s'appuye classiquement sur 5 piliers. Mais il lui reste à relever 5 défis pour être capable d'entrer de plein pied dans le monde à venir.

1) Accepter la critique

On peut rire de tout mais pas avec n'importe qui. C'est particulièrement le cas pour l'Islam. Rire et critique semblent ne pas faire partie de son vocabulaire. La liste des humoristes et des intellectuels visés par une fatwa est longue comme le bras. Une question se pose : on aurait le droit de bouffer du curé ou du rabbin à volonté mais se moquer d'un imam ou du prophète serait un crime de lèse majesté ? Allons, soyons sérieux : les religions doivent accepter la critique et l'humour, l'Islam ne peut pas échapper à la règle dans une société moderne et démocratique.

2) Se dépolitiser (ou accepter d'être combattu comme tout système politique)

Le paradoxe est total : l'Islam revendique une vision politique du monde (il n'y a d'ailleurs aucun pays musulman dont les lois soient déconnectées de la religion) et pourtant, sera impitoyablement traité d'islamophobe quiconque dira du mal de l'Islam. C'est pratique, ça permet de discréditer tout opposant en le faisant passer pour un raciste de même nature qu'un antisémite ou un anti-noir. La ficelle est un peu grosse mais elle marche. Pourtant dans le cas de la prétendue islamophobie, ce n'est pas une race qui fait l'objet du combat, mais une religion, avec une vision politique qui plus-est. Est-il interdit d'être antifasciste, antisocialiste, anti-républicain, anticommuniste ? Non ! Donc soit l'islam lance un débat politique et dans ce cas joue le jeu de la politique avec ses règles (débat, confrontation d'idées, respect de l'opposant), soit elle abandonne tout projet d'imposer sa vision politique du monde et se cantonne à la sphère privée, restant comme le font les autres religions une affaire de conviction personnelle.

3) Reconnaître pleinement l'égalité hommes-femmes

Peut-on accepter, dans une société moderne, que la moitié de sa population soit victime de discrimination ? Evidemment non ! C'est pourtant le cas dans le monde musulman. À qui sont confiées les tâches ingrates ? Qui doit se conformer à un code vestimentaire strict ? Qui s'occupe seule des enfants ? Qui est sous l'autorité de son mari ? La femme bien sur... Dans le même temps, qui peut avoir plusieurs femmes ? Qui va seul au café dans la tenue qui lui plait ? Qui est le seul maître à bord ? L'homme, ça va de soi. La tradition de la civilisation musulmane ne peut servir de prétexte à justifier un tel déséquilibre. Les femmes musulmanes donnent paradoxalement et malheureusement parfois le sentiment d'accepter cette domination dans une logique bien connue par les psychologues de « soumission librement consentie ». Mais d'autres le font uniquement sous la contrainte. Cette dissymétrie ne peut pas tenir sur le long terme. Les femmes ne l'accepteront pas éternellement. C'est une des révolutions majeures que le monde musulman doit mener.

4) Se débarrasser sans ambiguïté des intégristes et de la tentation totalitaire

Ce sera peut-être le plus difficile pour l'Islam mais c'est pourtant fondamental. On entend souvent dire qu'il y deux catégories de musulmans. D'un côté on aurait les intégristes, de l'autre les bons musulmans qui pratiquent leur religion tranquillement à la maison sans volonté de prosélytisme. La deuxième catégorie serait révoltée par la première... Dont acte ! Mais qu'elle le dise, qu'elle l'hurle même et qu'elle fasse le ménage dans ses troupes ! Pour bizarre que ça paraisse, on ne voit rien venir... La partie tranquille de l'Islam aurait-elle déjà trop peur de l'autre partie violente et autoritaire ? Ou, hypothèse que je ne veux pas croire, ne serait-elle pas au final compatissante à la perspective de voir les les idées poussées par l'Islam radical gagner les esprits. Quand on voit l'augmentation en flèche de la proportion des femmes qui portent le voile, dans une logique claire de conquête des territoires et des consciences, on ne sait dans quelle catégorie on se trouve : radical ou modéré ? Les femmes qui portent le voile et leurs maris sont-ils si opposées que ça à l'instauration progressive de la Charia ? Je veux bien croire que si. Mais si ils le sont, qu'ils l'affirment haut et fort. Force est de constater que le message ne passe malheureusement que de façon bien atténuée pour l'instant... Face à la tentation totalitaire, les musulmans laïques doivent donner de de la voix, vite avant qu'il ne soit trop tard.

5) Donner un avenir a sa jeunesse

Défiance vis à vis du monde moderne et de ses libertés, incapacité à penser la civilisation mondiale qui s'instaure depuis plusieurs décennies, mis à part certains pays pour lesquels le pétrole est tombé du ciel, le monde musulman passe trop souvent à côté de la mondialisation dont profite économiquement le reste de la planète. Qui paye les pots cassés ? Les jeunes principalement qui, dans une logique de victimisation post-coloniale et de repli identitaire, sont incités à la haine de l'Occident et de son système économique plutôt qu'à la croyance en son propre avenir et à la créativité pour la recherche de solutions. Le résultat est sans appel : chômage et pauvreté garantie pour ces jeunes dont une partie ira chercher des solutions bien moins positives mais efficaces pour assurer sa subsistance. Ceux qui refusent cette voie n'ont-ils d'autre possibilité que la révolte ?

Nous vivons une époque troublée de déclin relatif de l'Occident et de stagnation du monde musulman, alors que le reste du Monde s'émancipe et progresse. Du coup, les crispations sont de plus en plus fortes. La tectonique des plaques civilisationnelles semble engagée. Afin d'éviter un séisme de forte magnitude, les musulmans doivent réagir et relever au plus vite les 5 défis cités plus haut ! Et ceci qu'ils soient d'Egypte, de Turquie, de Tunisie, de Suède ou de France car les constats sont quasiment les mêmes  partout. Et les dangers de radicalisation, bien réels, sont également identiques dans presque tous les pays. Sans ce virage à 180°, la dérive totalitaire sera inévitable car les peuples ne pourront pas accepter sur le long terme les exigences imposées par l'islam politique. On pourra me rétorquer que l'Occident a bien des choses à corriger également. Certes... Mais au risque de choquer les partisans du relativisme culturel pour qui toutes les civilisations se valent, j'oserai avancer que l'universalité des valeurs de l'Occident semble tout de même faire un peu plus consensus auprès des autres civilisations comme le Japon, l'Inde ou même la Chine que ne peut le faire l'Islam auprès du reste du Monde. Et puis, les dérives de l'Occident ont déjà donné lieu à des auto-corrections salutaires. A l'opposé, l'Islam semble plutôt se durcir dans ses positions et revenir aux sources plutôt que se tourner vers l'avenir.
Musulmans laïques, ou êtes vous, que faites-vous ? On ne vous entend pas ! Surprenez-nous en déclenchant la perestroïka musulmane.
L'Islam 2.0 reste à inventer, c'est à vous de jouer !



1 commentaire
  • Commentaire par Gil
    07/26/2013 at 19:20
    L'islam n'est pas ou plus une religion. L'islam est devenu un système politique qui utilise le divin pour justifier son idéologie totalitaire.....

    Ton islam 2.0 pourrait voir le jour effectivement en respectant ces 5 défis proposés et particulièrement le point 2, selon moi.....mais j'ai bien peur mon ami que dans les pays autres qu'occidentaux, ce soir peine perdue...

    Quant aux islamistes modérés, nous les retrouvons chez nous, avec "l'Islam de France" qu'a voulu Nicolas Sarkozy en son temps...

    Plutôt que de vouloir diriger un peuple, il faut que l'islam retrouve sa place comme croyance personnelle..."L'esprit, en tant qu'il enveloppe l'essence du corps, sous l'espèce de l'éternité, est éternel, et que cette existence de l'esprit ne peut être définie par le temps ou expliquée par la durée" (Spinoza). Et je rajouterai personnellement "ni être utilisée pour gouverner un peuple dont les Hommes seraient libres et égaux devant leur nature profonde..
Laisser un commentaire